Qu'est-ce que l'habitat inclusif ? 

L'habitat inclusif est une solution innovante de logement qui répond aux besoins croissants d'autonomie et d'inclusion sociale des personnes âgées et en situation de handicap. Ce concept, qui se développe rapidement en France, offre une alternative entre le domicile traditionnel et l'établissement spécialisé.

La définition de l’habitat inclusif

L'habitat inclusif est un concept relativement récent. Il est défini par l'article L281-1 du Code de l'action sociale et des familles, introduit par la loi ELAN du 23 novembre 2018. Il s'agit d'un mode d'habitation regroupé, destiné aux personnes handicapées et aux personnes âgées, assorti d'un projet de vie sociale et partagée. 

L'habitat inclusif peut prendre diverses formes, telles que des colocations ou des appartements groupés, associant des espaces privatifs à des espaces communs partagés. Ce mode d'habitation permet aux résidents de vivre,  "chez soi sans être seul", dans un cadre adapté et sécurisé, tout en participant à un projet de vie sociale et partagée. Il vise à favoriser l'inclusion sociale des habitants en leur permettant de se loger dans les centres urbains, à proximité des commerces et des services.

Bien que ce concept soit en fort développement, en raison de son rôle déterminant en terme d’insertion sociale et professionnelle et de l’intérêt d’un certain nombre d’associations, l’habitat inclusif n’apporte pas, pour le moment, une réponse aux besoins de logement des personnes handicapées.

Les colocataires de la Fratries de Versailles témoignent lors de l'inauguration en mars 2025. Photo Steven Roussel

Les chiffres de l’habitat inclusif et du logement des personnes en situation de handicap

La Fondation pour Le Logement des Défavorisés a consacré son Rapport sur l'État du Mal-Logement en France 2025 aux freins que rencontrent les personnes en situation de handicap dans l’accès au logement.  

Ainsi, les personnes en situation de handicap sont, par exemple, plus souvent victimes de précarité financière : 26% vivent sous le seuil de pauvreté (contre 14% pour les personnes valides). Cela rend difficile leur accès à des logements dans le parc privé.  

Elles sont par ailleurs particulièrement victimes de discrimination. Selon Manuel Domergue, de la Fondation pour le Logement des Défavorisés , certains propriétaires refusent de prendre en compte l’allocation adulte handicapé ou la pension d’invalidité comme une source de revenus et l’associent à une forme d’instabilité ». 

Enfin, 18 %, seulement, des logements sont aujourd’hui accessibles aux personnes handicapées, selon les bailleurs sociaux. La loi Elan (Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique) de 2018a abaissé l’obligation de produire des logements accessibles dans les nouvelles constructions de 100% à20%.

L'habitat inclusif peut donc représenter une opportunité pour mieux loger des personnes en situation de handicap avec un objectif d’insertion sociale.

Aujourd’hui, plus de 10 000 personnes bénéficient déjà de ce type de logement et près de 1 000 projets sont en cours d’élaboration. Cela traduit sans aucun doute, une volonté croissante de l’Etat, des professionnels, comme des collectivités d’offrir des solutions alternatives aux établissements médico-sociaux.

Pourquoi soutenir l’habitat inclusif ?

L’enjeu de l’habitat inclusif est bien de proposer une offre de logement améliorée par rapport à un logement ordinaire, notamment en intégrant mieux les problématiques auxquelles font face les personnes en situation de handicap. Pensé comme une alternative aux structures traditionnelles : l’habitat inclusif offre une solution intermédiaire entre le domicile classique et l’établissement spécialisé. La médicalisation parfois nécessaire est adaptée aux besoins de chacun des locataires.

Cela passe notamment par : 

  • Un cadre de vie adapté : Les logements sont conçus pour répondre aux besoins spécifiques des résidents (accessibilité, équipements adaptés, domotique...). L’habitat inclusif DALIAA à Saint-Etienne qui loge 9 adultes atteints de troubles du spectre autistique intègre les besoins spécifiques des locataires. Un appartement témoin permet d’accompagner chaque locataire progressivement à l’entrée dans le logement. L’architecte a dessiné les espaces en abaissant certains plafonds, en délimitant des alcôves à l’aide de claustras, en dissimulant certains commandes (en particulier de chauffage) pour limiter le stress des locataires.
  • Un projet de vie sociale et partagée : Au-delà du logement, l’habitat inclusif favorise les interactions sociales et l’entraide entre les habitants. C'est notamment le cas de la Maison du Hameau Saint-Michel, un projet développé par SOLIHA Centre-Val-de-Loire. Dans cet hôtel particulier en centre-ville de Tours, une dizaine de logements accueille des personnes avec et sans handicap dans une ambition de mixité sociale. Des espaces communs permettent d’organiser des moments conviviaux qui favorisent l'entraide et l'inclusion sociale.
  • Un accompagnement médico social favorisant l’autonomie : Les locataires conservent leur indépendance tout en bénéficiant d’un soutien adapté à leurs besoins, réalisé par un professionnel. Le projet Fratries, par exemple, permet à de jeunes adultes en situation de handicap de vivre en autonomie dans une colocation tout en bénéficiant de l’accompagnement d’un maître de maison qui vit sur place. Cet accompagnement concerne la vie quotidienne mais également le projet professionnel du locataire. Les locataires bénéficient également de l’intervention d’auxiliaire de vie sociale qui va l’accompagner dans ses tâches quotidiennes : préparation des repas, entretien du logement, aide aux démarches, hygiène…

Isaulde emménage dans son appartement à Tours, un projet créé par SOLIHA Centre Val-de-Loire

Comment est financé l’habitat inclusif ?

Le financement de l’habitat inclusif est un enjeu important d’autant plus qu’il s’adresse à des personnes, en situation de handicap ou en perte d’autonomie, dont les ressources financières peuvent être très faibles.

L’objectif visé d’insertion sociale des personnes implique de maintenir des niveaux de loyers bas pour qu’ils correspondent aux ressources des locataires. Cela nécessite de construire des modèles économiques complexes faisant appel à une multitude de sources de financement.

Il faut ainsi distinguer l’investissement (le financement de l’acquisition d’un bien immobilier, des travaux d’aménagement) du fonctionnement des projets (le financement d’un poste de maître ou de maîtresse de maison qui va accompagner les locataires, l’accompagnement par les auxiliaires de vie sociale…).

  • Pour financer l’investissement, les acteurs peuvent porter directement l’acquisition avec le concours de la dette bancaire, accompagnée par des subventions privées (fondations principalement) ou publiques (certaines collectivités participent au financement de l’investissement). Ils peuvent également se tourner vers des solutions dîtes de portage foncier en allant chercher des investisseurs qui vont acquérir le bien à leur place et ensuite leur louer, souvent avec un loyer minoré. C’est le cas de l’association Fratries qui s’appuie sur des investisseurs comme Amarris, Eleos, Solenvi ou la société d’investissements solidaires Soliko. Un certain nombre d’habitats inclusifs sont également conventionnés en logement social. Dans ce cas là, avec le concours d’un acteur agréée, les porteurs de projet d’habitat inclusif peuvent mobiliser les financements dédiés au logement social pour financer les travaux de réhabilitation. Par ailleurs, les locataires peuvent bénéficier d’aides au logement. C’est le cas du projet DAALIA à Saint-Etienne, dont l’ensemble des logements sont conventionnés.
  • Par ailleurs, le financement du fonctionnement des projet est soutenu par le dispositif de l'Aide à la Vie Partagée (AVP). Mise en place depuis 2023, elle remplace progressivement le Forfait habitat inclusif créé en même temps que le dispositif habitat inclusif. D’un montant de 5 000 à 10 000euros par an et par habitant, elle finance l’intervention des maîtres et maîtresses de maison et des auxiliaires de vie sociale. Elle est versée par les conseils départementaux aux porteurs de projets conventionnés. Elle est versée sans condition de ressources.

Le développement de l’habitat inclusif

L’habitat inclusif est parfois critiqué, notamment par les associations spécialisées, qui considèrent que le périmètre défini par la législation est trop restreint, au détriment du secteur médico-social. Par ailleurs, l’utilité sociale des projets d’habitat inclusif n’est pas toujours bien documentée, voire n’existe pas. Compte-tenu de la précarité dans laquelle vivent un grand nombre de personnes handicapés, il est nécessaire que les projets intègrent un engagement sur les niveaux de loyers pratiqués en plus de la dynamique d’accompagnement au titre du handicap.

L'habitat inclusif apparaît comme une solution intéressante pour répondre aux besoins de logement et d'accompagnement des personnes en situation de handicap ou en perte d'autonomie. Il favorise leur inclusion sociale et leur autonomie, tout en offrant un cadre de vie adapté et sécurisant. Cependant, son développement nécessite encore des ajustements législatifs et un soutien accru des pouvoirs publics et des acteurs de l'économie sociale et solidaire. L'avenir de l'habitat inclusif dépendra de la capacité à concilier les besoins individuels des résidents, les contraintes économiques et les objectifs d'inclusion sociale.

Investir dans l’habitat inclusif

L’habitat inclusif constitue une opportunité pour les investisseurs engagés dans l’économie sociale et solidaire. Plusieurs acteurs comme la foncière Fratries, la société d’investissements solidaires Soliko, la foncière Entreprendre pour Humaniser la Dépendance du mouvement Habitat et Humanisme permettent de financer des projets d’habitat inclusif à impact social fort, contribuant ainsi au développement de logements adaptés et accessibles aux plus précaires.

En choisissant d’investir dans ce secteur, les particuliers et les entreprises participent activement à une société plus inclusive et solidaire, tout en bénéficiant du dispositif de réduction d’impôt IR PME ESUS.